Hier soir, c’était la fête de l’anniversaire de Lord Krishna, ce dieu souvent représenté en enfant et qui adore les sucreries. On s’est retrouvé là un peu par hasard, après avoir vu Ratatouille au cinéma (merci les scènes de nourriture française !), sur G.M. Road. Hors cette fête est organisée par le Shiv Sena, avec leurs beaux drapeaux oranges (symbole de l’hindouisme), et une fière horloge dans le dos.
Le Shiv Sena, c’est un parti nationaliste hindou qui a beaucoup de pouvoir dans le Maharastra. Dans leur idéologie, on retrouve la volonté de rejeter l’Hindi et l’Anglais, les 2 langues supposées nationales, et une certaine hostilité face aux musulmans. Autrement dit, un parti extrémiste qu’en tant que blancs, on ne peut pas vraiment apprécié… Mais c’est réciproque.
Ils sont donc très stricts, possèdent une armée qui, quand elle agit, n’est pas dérangée par la police, imposent des lois qui font régresser… Cela au nom du respect de l’hindouisme et la protection de la culture. Vous vous rappelez peut-être le baiser de Richard Gere, donné à Shilpa Shetty ? C’était un bisou sur la joue, à la télé, entre un blanc et une indienne. Résultat, des membres du Shiv Sena se sont retrouvés, à Bombay notamment, pour brûler et battre des effigies de Gere. Comme si l’actrice, qui a passé une grande partie de sa jeunesse à Londres, n’avait pas déjà… Enfin vous voyez, quoi.
India Today a écrit un très bon article à ce sujet, se moquant ouvertement des juges qui avaient délivré un mandat d’arrêt contre Gere. Certaines personnes ici se croient et s’auto-nomment Défenseur de la Culture et de la Morale, allant à l’encontre d’une grande partie de la population, et souvent d’une évolution normale des mentalités.

Mais revenons à nos bébés Krishna. Pour son anniversaire, on accroche à une dizaine de mètres de hauteur des jares, remplies de Curd (une sorte de fromage blanc). Des jeunes hommes entrainés vont ensuite tenter de faire des pyramides humaines pour aller briser cette jare, et délivrer ainsi la gourmandise à l’intérieur.
On est arrivé sur place vers 22h30, en sentant déjà un regard étrange sur nous. Un jeune a laissé échapper un léger Angrezo Bharat Chhodo, que j’ai tout de même entendu et compris… Les blancs, quitter l’Inde. Littéralement : les anglais qui nous ont envahis (angrezo), l’Inde (Bharat, inde en hindi), Partir (Chhodo). Angrezo fait maintenant référence à un blanc en général, surtout dans les milieux non-éduqués. Déjà, la soirée commençait bien.
Après 2h30 d’attente, à contempler la puissance de l’organisation indienne, c’est à dire rien, tout le monde debout à attendre, avec un feu d’artifice qui part toutes les 2 minutes du milieu de la foule (et qui lui retombe dessus après, pas du tout dangereux), des enfants commencent à escalader. Faux départ, ils font 3 ou 4 étages, saluent Krishna, et redéscendent. Vers minuit (et c’était prévu), le vrai groupe d’horloges oranges arrive et commence à s’agglutiner en dessous du dessert. En moins de 2 minutes, ils montent 8 étages humains, encouragés par les cris de la foule, et cassent le pot, se retrouvant recouverts de Curd ! La descente est un peu difficile et celui qui était tout en haut tombe, on le verra passer un peu plus tard porté par 2 jeunes pour aller se faire soigner. Tous crient, la foule une fois l’évènement passé se dépêche bien vite de partir. Tout va très vite, une amie française se fait tripoter de partout, quelques Angrezo Bharat Chhodo, et on se dit que, non, on n’est vraiment pas les bienvenus… Bien sûr, ça ne sortira de la bouche que de quelques-un, mais le fait est là.

Heureusement qu’aucun de nous n’y est allé seul, à cet évènement populaire qui avait pourtant des allures de 14 Juillet, heureusement que notre amie blanche n’était pas toute seule…
En tout cas, pour tous ceux qui pensent que l’Inde est un pays ouvert, avec une mentalité d’accueil incroyable… C’est vrai pour certains, mais dans la tête du Shiv Sena, il n’y a que 3 pays : l’Inde, pays hindou (enfin surtout le Nord, le Sud c’est moins bien), le Pakistan, nos ennemis les musulmans, et l’Angleterre, qu’on a réussi, nous les hindou, à mettre dehors….